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NISO RP-49-202X, ou comment expliquer aux éditeurs qu’ils doivent simplifier leurs workflows

La NISO (National Information Standards Organization) publie un projet de recommandation intitulé « Open Access Business Processes (OABP) Recommended Practice » (NISO RP-49-202X), ouvert aux commentaires publics jusqu’au 17 octobre 2025.

Alors que la plupart des workflows ont été initialement conçus pour les modèles par abonnement, ce texte tente de répondre à l’essor des publications en accès ouvert, en proposant :

  • Un glossaire partagé pour clarifier la terminologie,
  • Des spécifications claires de métadonnées afin d’harmoniser l’échange d’informations,
  • Des indications pour le reporting, le suivi financier et la gestion des accords.

L’idée, c’est de faciliter la collaboration entre tous les acteurs du secteur de la publication scientifique, quels que soient leurs modèles, en ajoutant un peu plus de transparence au passage.

Les autrices identifient un certain nombre de lacunes dans les process actuels, notamment :

  • Des normes et des métadonnées insuffisantes : elles soulignent le manque cruel de standards robustes pour le transfert des données entre acteurs à différents stades des workflows, des difficultés pour désambiguïser et vérifier affiliations institutionnelles, les agences de financement et les appels à projets, souvent à cause de champs en texte libre peu structurés. A cela s’ajoute la sous-utilisation des identifiants persistants (PIDs), qui existent pourtant pour les auteurs comme pour les institutions, et le manque de capacité des systèmes à gérer des paiements multi-acteurs, et/ou multi-affiliations. Ces insuffisances compliquent aussi la production de rapports pour évaluer les accords.
  • Une communication imprécise et non/mal définie : les autrices pointent un manque de clarté entre acteurs sur qui communique quoi, quand, comment et à qui dans les workflows, qui aboutit à des réponses parfois contradictoires dans la communication sur les coûts, les licences, les critères d’éligibilité, et les changements dans les portefeuilles de revues. Les éditeurs ne renseignent pas non plus systématiquement toutes les dates importantes (soumission, acceptation, publication), ce qui peut impacter l’éligibilité des articles. Tout cela entraîne confusion et frustration chez les auteurs, notamment lors de la phase de soumission de leurs publications.

Elles proposent pour y remédier, entre autres :

  • La création d’un dictionnaire de données normalisé pour structurer échanges et rapports.
  • L’intégration systématique des identifiants persistants dans tous les workflows, pour améliorer la traçabilité et la désambiguïsation.
  • Une définition claire des responsabilités et des modes de communication pour les différents acteurs à chaque étape des workflows.
  • Le développement d’un cadre modulable, pour s’adapter aux contextes locaux et aux modèles économiques différents.
  • La mise en place de mécanismes pour le suivi de toutes ces transactions, intégrant une meilleure gestion des paiements multi-acteurs.

Le projet se concentre uniquement pour l’instant sur les articles de revues, avec la perspective dans un deuxième temps d’étendre les recommandations aux livres, aux prépublications et aux actes de conférences.

Si vous envisagez de vous lancer dans la documentation électronique ou la science ouverte, ce type de document offre un bon panorama des modèles et des enjeux à l’oeuvre.

[Image : Reflect by xiaofan]

De l’importance des workflows pour les accords OA

6014917153_7ba8d142c7_o_dLes bibliothécaires de l’Université de Vienne, en Autriche, ont publié une analyse fort intéressante des différents contrats qu’ils ont négociés avec les éditeurs contenant une dimension « open access » ; plus précisément, ils se sont attachés à décrire les différents workflows à l’oeuvre pour couvrir le cycle complet de la diffusion en OA, de la soumission de l’auteur aux modalités de paiement et/ou de suivi de la dépense d’APC. Voici ce que l’on peut en retenir :
L’université de Vienne est une grosse université (90 000 étudiants), qui a passé des accords comportant un volet OA pour 14 ressources. On distingue 4 types d’accords :

  • Les « Read and publish » : ils fonctionnent sur le même principe que les big deals pour les ressources sur abonnement, avec un forfait négocié pour couvrir les APC des articles publiés par les auteurs de l’établissement.
  • Les accords de compensation (« offsetting agreements ») : soit la dépense d’APC est déduite de la dépense d’abonnement, soit la dépense d’abonnement ouvre droit à une importante remise sur les coûts des APC.
  • Les accords avec des éditeurs OA Gold payant : l’adhésion institutionnelle donne droit à une remise sur les APC, ou permet de mettre en place un système de pré-paiement.
  • Les autres accords : l’institution soutient financièrement une initiative, sur le modèle de SCOAP3 ou OLH.

Ce qui saute immédiatement aux yeux, c’est la diversités des modes de fonctionnement de chaque accord : certains éditeurs ont une interface claire et des consignes compréhensibles pour les auteurs, d’autres perdent ces derniers avec des désignations inhabituelles de leur institution de rattachement. La mention du fait que les APC sont pris en charge par l’institution est plus ou moins visible selon les plateformes. Certains éditeurs envoient une seule facture, d’autres de multiples factures, et acceptent ou pas de les envoyer à l’institution et pas directement au chercheur. Des accords portent sur tous les types de documents ou de revues, d’autres ne concernent que les articles de recherche ou les revues hybrides.

Même pour un bibliothécaire c’est compliqué !

Dans ces conditions, la principale difficulté est de communiquer toutes ces subtilités aux enseignants-chercheurs : malgré les différentes activités de sensibilisation et de promotion, informer tous les chercheurs de l’établissement sur les différentes possibilités qui s’offrent à eux relève de la mission impossible ; et pourtant le site web d’information sur l’open access monté par la BU est plutôt bien fait.

L’identification correcte des enseignants-chercheurs, permettant de vérifier leur éligibilité aux bénéfices de l’accord est également une étape cruciale : les bibliothécaires constatent que lorsque les éditeurs mettent des moyens humains pour faciliter cette identification, le système est bien plus efficace, et le taux d’articles diffusés en OA grimpe, alors qu’il stagne, voire décline, quand ce n’est pas le cas. Malheureusement un seul des éditeurs avec lesquels traitent les collègues viennois a mis suffisamment de moyens…

A celà s’ajoutent la mauvaise qualité des métadonnées et les modes de facturation variés, qui complexifient le travail de suivi et la traçabilité des dépenses, malgré les mandats des financeurs de la recherche.

Pour les bibliothécaires, la question des workflows doit être intégrée très tôt dans la négociation avec les éditeurs :

Nous avons appris à nos dépens que, pour qu’un accord aboutisse, les workflows doivent occuper une place centrale et que des discussions doivent être engagées dès les premières étapes des négociations. Il s’est avéré essentiel d’établir une communication directe non seulement avec l’équipe commerciale de l’éditeur, mais aussi avec le personnel responsable des workflows d’OA. Idéalement, une démonstration en direct devrait être organisée, au cours de laquelle le personnel compétent de l’université, comme les chercheurs et le personnel du service en charge de l’open access, peut tester sur le terrain chacune des étapes que les auteurs correspondants devront franchir au fur et à mesure du processus de publication. A défaut, l’éditeur pourrait fournir des captures d’écran détaillées du processus. Quoi qu’il en soit, ce serait l’occasion d’attirer l’attention sur les problèmes potentiels et d’envisager des solutions pour y remédier.

Ils concluent qu’il y a une vraie refonte des modes de fonctionnement à imaginer, et que ce sont essentiellement les pratiques des éditeurs qui doivent évoluer :

Les accords de publication en open access ont le pouvoir de faire augmenter considérablement la proportion de publications en OA produites par les institutions,  et de contribuer ainsi à la transition vers l’OA. Toutefois, le succès de ce type de projet dépend en grande partie de la conception et de la mise en œuvre judicieuses des workflows. Bien que tous les acteurs concernés aient un rôle important à jouer dans ce contexte, la responsabilité principale incombe aux éditeurs, qui doivent repenser les flux de travail existants et intégrer la publication en open access dans leurs systèmes. Essayer de construire un workflow de la publication en OA juste en adaptant les méthodes actuelles de gestion des abonnements ne donnera pas de résultats satisfaisants.

Source : Pinhasi, R., Blechl, G., Kromp, B., & Schubert, B. (2018). The weakest link – workflows in open access agreements: the experience of the Vienna University Library and recommendations for future negotiations. Insights, 31, 27. DOI: http://doi.org/10.1629/uksg.419
[Photo : atoach]


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