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Renforcement de la politique d’accès ouvert du gouvernement américain

L’Office of science and technology policy (OSTP) de la Maison Blanche vient de mettre à jour la politique gouvernementale de mise à disposition et de diffusion des résultats de la recherche scientifique publique, définie en 2013. Celle-ci concerne désormais toutes les agences de financement de la recherche (et plus seulement les plus importantes), donc aussi celles qui couvrent les SHS, ce qui est nouveau (et promet de nombreuses discussions avec les éditeurs…) ; les agences ont jusqu’à fin 2026 pour la mettre en oeuvre.

Cette nouvelle politique marque la fin des embargos sur les publications : on vise l’OA immédiat, fini les 6 ou 12 mois. A noter, sont concernées les publications avec un auteur ou un co-auteur bénéficiant d’un financement public : pour les collaborations ça risque d’être compliqué – ou au contraire de simplifier les choses… Enfin je dis public, mais c’est fédéral : il va déjà falloir une harmonisation locale entre la politique fédérale et les mandats des universités américaines – on peut supposer que tout le monde va dans le même sens, mais il est toujours possible qu’il y ait des points de friction.

Par « publication », le memorandum entend a minima les articles scientifiques validés par les pairs ; pour les livres et chapitres de livres, et les communications c’est à la discrétion des agences.

Les données de recherche sont prises en compte dans ce dispositif : elles doivent être mises à disposition en même temps que les publications le cas échéant, et faire l’objet de plans de gestions des données. Par ailleurs, les entrepôts de données doivent être conformes aux préconisations du National Science and Technology Council.

Si des frais de publication et/ou des frais de gestion des données « raisonnables » peuvent être intégrés dans les budgets de recherche, la voie verte reste privilégiée : tout doit être déposé dans une archive ouverte ou un entrepôt de données définis par les agences, il ne suffit pas de publier dans une revue OA.

L’accent est également mis sur les questions d’intégrité scientifique : une plus grande transparence sur les affiliations et les financements est demandée pour redonner aux contribuables américains confiance dans la recherche publique ; celle-ci passe entre autres par l’attribution d’identifiants pérennes pour toutes les productions de recherche, y compris les protocoles et les financements.

Bref, une avancée significative pour l’accès ouvert, à saluer, reste à voir comment tout cela va être implémenté : un équivalent à la stratégie de rétention des droits de la Coalition S va-t-il émerger ? Celle-ci en tout cas « se réjouit de travailler avec l’OSTP et d’autres agences de financement afin d’aligner davantage nos politiques en vue de fournir un accès ouvert et immédiat aux résultats de la recherche. »

Sources : OSTP Issues Guidance to Make Federally Funded Research Freely Available Without Delay, Memorandum of the OSTP, Peter Suber, Coalition S welcomes the updated Open Access policy guidance from the White House Office of Science Technology and Policy

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Le (bon) plan S

38028099792_44acda4c73_oScience Europe vient d’annoncer le lancement de la « Coalition S« , un accord signé par 11 organismes financeurs de la recherche en Europe, dont l’ANR. Et c’est l’occasion d’en apprendre un peu plus sur le fameux Plan S élaboré par le chargé de mission pour l’open access de la Commission Européenne, Robert-Jan Smits (RJS). En effet, cette coalition s’engage sur l’objectif principal du Plan S, à savoir l’obligation de diffusion en accès ouvert, à compter du 01/01/2020, de toute la littérature de recherche financée par des fonds publics ; la diffusion pouvant se faire soit dans des revues en open access, soit sur des archives ouvertes.

Le Plan S se décline en 10 points (je résume) :

  • Les auteurs conservent leurs droits et diffusent leurs travaux sous une licence ouverte
  • Les financeurs vont définir des critères et un haut niveau de service pour qualifier les revues OA et les plateformes d’archives ouvertes labellisés
  • Les financeurs soutiendront la création de revues et de plateformes si besoin ; ils soutiendront également les infrastructures de l’open access
  • Les APC seront payés par les financeurs ou par les institutions (et pas par les individus)
  • Les APC seront standardisés et plafonnés au niveau européen
  • Les universités, organismes de recherche et BU devront aligner leurs politiques et leurs stratégies en la matière
  • Tous les produits de la recherche sont concernés par cette politique, même les ouvrages, bien que pour ceux-ci une tolérance soit accordée  au niveau du délai de mise en place
  • Le rôle des archives ouvertes pour la conservation à long terme des productions de recherche et pour l’innovation éditoriale est réaffirmé
  • Exit les hybrides : le modèle hybride n’est pas compatible avec les objectifs du plan S
  • Les financeurs feront une suivi du respect de ces règles et sanctionneront les manquements

Evidemment, les éditeurs ne voient pas ce plan d’un bon oeil : le refus des hybrides signerait la fin de la liberté académique du chercheur et freinerait la transition vers l’open access, le plan « saperait le travail de validation effectué par les revues de qualité » et ne serait « pas soutenable pour les revues du groupe Science », selon un porte-parole de l’éditeur.

PS : Pour quoi un plan « S » ? C’est « S » pour « Science, Speed, Solution, Shock », selon RJS.

Sources :
European science funders ban grantees from publishing in paywalled journals
Radical open access plan could spell end to journal subscriptions

La feuille de route de l’EUA pour l’OA

L’European Universities Association, EUA, qui rassemble 850 établissements dans 47 pays, vient de sortir une feuille de route pour l’accès ouvert aux publications de recherche, qui constitue une première étape dans un plan plus large de développement de l’Open Science.
Il s’agit de mettre en place un système de publication juste et transparent, respectueux d’un équilibre entre les coûts et les bénéfices, qui permette de faire émerger de nouveaux modes de production et de diffusion des savoirs.
Les objectifs sont larges : promotion des politiques en faveur de l’OA, réflexion sur les modes d’évaluation de la recherche, évolution du cadre juridique de la publication, évolution des modèles économiques, promotion du partage de données et de la fouille de textes (TDM), normalisation des politiques institutionnelles en matière d’OA pour la recherche et pour la pédagogie.
Pour y arriver, l’EUA propose une série d’actions :
– établir une cartographie des politiques institutionnelles d’OA, avec un suivi des accords avec les éditeurs
– partager les bonnes pratiques en matière de négociation de type « big deal », et en extraire des recommandations pour les négociations
– définir des recommandations sur les politiques institutionnelles d’OA, et favoriser l’émergence d’infrastructures et d’initiatives européennes en faveur de l’OA
– favoriser le dialogue entre les chercheurs et leurs institutions (autour des modalités d’évaluation et de reconnaissance académique), entre les différents acteurs institutionnels et associatifs, et avec les éditeurs (autour de modèles économiques viables)
– mobiliser les politiques autour d’un modèle de publication équitable

Tout ceci, rappelons-le, se passe dans un contexte plutôt favorable, avec la présidence hollandaise de l’UE, qui affiche des ambitions très fortes en matière d’open access.

JOA 2015 : le chaud et le froid

12375616634_a680cc00b6_zRassurez-vous tout de suite, ceci n’est pas un CR exhaustif des 6èmes Journées Open Access organisées par Couperin il y a quelques semaines : 30 interventions réparties sur 4 demi-journées, c’est bien trop dense pour un billet de blog !

Impression générale de chaud et froid : des interventions positives (souvent celles témoignant de projets ou de réalisations dans les établissements, d’ailleurs) alternant avec des interventions nettement plus nuancées, qui suggèrent qu’il nous reste encore quelques étapes avant d’arriver à un consensus sur ce que devrait être une politique de l’open access en France, contrairement à ce qui se fait chez nos voisins européens (UK, NL), qui ont opté pour une approche globale (qu’elle soit en faveur du gold ou du green).

Ce que je retiens de cette édition :

  • L’open access est bien un enjeu économique fort  : l’intervention déprimante (sur le fond, pas sur la forme) mais salutaire de Sami Kassab, l’analyste d’Exane BnP Paribas, montre clairement que chaque initiative marquante en faveur de l’open access (lancement de PLoS, obligation de dépôt des NIH, rapport Finch…) se répercute sur la performance du cours de bourse d’Elsevier ; de menace pour le secteur de l’édition académique, l’OA est devenu depuis 2012 une opportunité de croissance pour les éditeurs, avec l’avènement du modèle gold-avec-APC.jao2015
  • On s’en doutait, maintenant c’est prouvé, chiffré par les anglais : l’OA hybride coûte 3 fois plus cher que l’OA gold ! Et les APC représentent désormais 12% de la dépense globale pour les articles (1% pour les frais de gestion, et les 87% restants pour les abonnements), selon une étude menée par un groupe d’universités britanniques.
  • L’UE peut jouer un rôle moteur pour l’OA en Europe : l’obligation de dépôt du programme H2020 est un puissant outil de sensibilisation des chercheurs aux questions de diffusion des résultats de recherche et de conservation des données. L’approche volontairement flexible adoptée pour la diffusion des données (« aussi ouvert que possible, aussi fermé que nécessaire ») semble fonctionner
  • Tout le monde n’est pas dans le brouillard : il y a des établissements qui ont une vision claire de ce qu’est l’OA, et de comment y arriver (INRIA, INRA, Strasbourg), ça rassure.
  • L’évaluation pose toujours question : du côté des revues, avec les éditeurs prédateurs – mais des initiatives comme Quality Open Access Market, QOAM se mettent en place pour clarifier le paysage – , en ce qui concerne les chercheurs par contre, il semble qu’il faille encore un peu de temps avant que les modes d’évaluation intègrent la publication en OA au crédit du chercheur.

Les vidéos des interventions des JAO 2015 sont disponibles en streaming et en téléchargement sur le site de CanalU.

[Photos : Lydia Brooks, @mdelhaye]


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