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LIBER 2019

mdeJ’ai eu la chance d’assister à la conférence LIBER, qui avait lieu cette année au Trinity College, à Dublin. La thématique de cette année, « Research libraries for society« , a fait émerger un volet de la science ouverte que j’ai assez peu vu traité jusqu’ici, en tout cas dans le milieu des BU françaises : celui de la « Citizen science », c’est à dire la science « participative » ou « citoyenne » en bon français. J’ai participé au workshop dédié, qui a donné lieu au lancement du groupe de travail éponyme au sein de Liber – un projet à suivre.
C’était une édition de bonne tenue, trois jours très denses, du coup pas de compte-rendu exhaustif mais quelques notes sur des interventions fort intéressantes :

Are we plan S ready ? Level of compliance at the University of Vienna
Support : https://zenodo.org/record/3258038
L’université de Vienne est une grosse université (90 000 FTE), avec un service OA dédié, en charge de l’archive ouverte, de la gestion des accords et des fonds pour le financement de la publication en gold OA, du conseil et de l’accompagnement des publiants. Elle a conclu des accords transformants avec des éditeurs traditionnels et avec des pure players de l’édition OA.
Un accord transformant, c’est :

  • un accord entre les éditeurs et les financeurs/les institutions

  • dont l’objectif est la transition des revues vers une diffusion entièrement OA

  • avec un passage du modèle de l’abonnement (on paye pour lire) à un modèle prenant en compte le volume de publication (on paye pour publier)

Les bibliothécaires ont cherché à savoir dans quelle mesure les accords transformants sont-ils compatibles avec le plan S. Pour ce faire, ils ont analysé le champs ‘financement’ des publications des enseignants-chercheurs autrichiens extraites du WoS et de Scopus sur l’année 2017, en regardant celles publiées dans des revues participant à un accord transformant et dans des revues présentes dans le DOAJ.
Résultats : 57% des publis sont disponibles sur des plateformes compatibles avec le plan S (+ 5% en cours de négociation), les 38% restants étant publié dans des revues sur abonnement (majoritairement chez Elsevier), sans accord négocié.
Difficultés rencontrées :

  • Financement de la publication en OA : le fait d’être à coût neutre reste une sorte de Graal, qui n’est pas facile à définir (notion de chiffre d’affaire historique, volume de publications, volume d’APC déjà payés) ; les bibliothécaires pointent par ailleurs la nécessité de trouver des sources de financement complémentaires pour payer l’OA gold (mais pas de piste évoquée), ainsi  que leurs inquiétudes face aux éditeurs qui augmentent leurs revenus avec les APC, sans qu’il y ait une compensation sur la dépense en abonnements.

En conclusion : être compatible avec le plan S n’est pas impossible, mais nécessite un mix entre la voie verte et la voie dorée. Je note aussi l’intérêt des accords transformants, dont on n’a pas encore vraiment fait l’expérience en France (à part avec EDP Sciences, mais je n’ai pas encore vu de retours de ce type sur cet accord).

Is the library open ? Correlating public access to academic libraries with open access support
Support : https://zenodo.org/record/3258040
Il s’agit d’une initiative originale menée par COKI (Curtin Open Knowledge Initiative), une équipe pluridisciplinaires hébergée par le Centre de culture et de technologie de l’université de Curtin, Australie. L’équipe a voulu savoir, en gros, si les campus étaient « ouverts », et dans quelle mesure, en prenant l’ouverture des bibliothèques comme représentative du niveau d’ouverture des campus ; l’idée est de regarder si l’accès physique à la BU est cohérent avec les politiques OA de l’institution.
A partir d’un set de 20 institutions, de tous les continents, on met en parallèle les catégories d’usagers et les droits qui leur sont alloués dans les BU : accès physique, prêt, consultation sur place, impression, accès aux ressources électroniques sur place, wifi, accès à des ordinateurs, aide d’un bibliothécaire, PEB, accès aux ressources électronique distant. On regarde aussi les coûts pratiqués pour les extérieurs – plusieurs raisons à ces coûts : compensation, financement supplémentaire, moyen de gestion de la demande (mais est-ce que les BU dont l’accès est gratuit sont forcément mieux financées ?). On regarde ensuite les informations disponibles sur le web public, on agrège les politiques OA, la présence d’une archive ouverte, d’un fonds de financement pour les APC, l’absence de restriction à l’accès physique aux BU, l’absence de coût pour cet accès pour déterminer des scores pour chaque établissement étudié.
Résultats :

  • Les politiques OA sont généralement plus « open » que les politiques d’accès physique aux BU

  • On note pas mal de disparités entre les 2 dimensions

  • Intéressant graphique sur la répartition par région du monde entre green et gold

  • Importance d’une bonne communication, claire sur les politiques d’accès

C’est un travail qui se poursuit, l’équipe compte à terme inviter les BU à examiner leurs propres données, et inclure d’autres établissements dans son étude.

Deep green – Open access transformation
Support : https://zenodo.org/record/3258069
Comment alimenter les AO en contenus ? C’est la question que tout le monde se pose, et à laquelle les bibliothécaires allemands répondent avec Deep Green. Ils partent du principe que les éditeurs ont les métadonnées qui vont bien. L’objectif du projet est donc d’alimenter les archives ouvertes avec du contenu produit par les éditeurs, en tenant compte des accords négociés et des politiques éditoriales, et ce de la façon la plus automatisée possible.
Comment ça marche ?

  • Les éditeurs déposent leurs métadonnées et leur texte intégral sur un serveur FTP

  • Deep Green fait la correspondance des affiliations (c’est le plus compliqué)

  • Deep Green livre les métadonnées et le texte intégral aux AO (via des API, SWORD, OAI-PMH)

L’infrastructure technique est open source (github) ; une version beta est prévue à l’été 2019 ; les éditeurs participants pour la première phase sont : Karger, Sage, Frontiers, BMJ, De Gruyter, MDPI + 30 archives ouvertes

Atouts : coopération avec les éditeurs + fort intérêt des institutions universitaires allemandes
Difficultés : trouver les droits de diffusion en OA, récupérer les métadonnées auprès des éditeurs. La négociation avec les éditeurs est chronophage et parfois onéreuse. Ils proposent d’ailleurs d’inclure la fourniture des métadonnées dans les négociations de façon plus systématique, y compris pour la version de référence des articles (« version of record »). La qualité des métadonnées n’est pas toujours au rendez-vous, il faudrait définir un standard de métadonnées.
Et après ? Il aimeraient étendre le système à d’autres types de documents (les ebooks sont prévus), et surtout aux pays voisins, et créer un réseau de Deep Greens – Je note qu’en France le fait d’avoir HAL nous faciliterait les choses (vu qu’on n’aurait qu’un seul tuyau à brancher, en quelque sorte), contrairement à la plupart des autres pays européens où chaque institution a sa propre archive.

Tous les supports sont disponibles sur Zenodo, ainsi que les enregistrements audio et/ou vidéo ; si vous avez un peu de temps, ça vaut le coup de s’y plonger.

[Photo : @marlened – évidemment, impossible d’aller à Dublin sans visiter The long room, « la » salle de lecture archétypale des bibliothèques. Et c’est vrai que c’est impressionnant !]

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Le (bon) plan S

38028099792_44acda4c73_oScience Europe vient d’annoncer le lancement de la « Coalition S« , un accord signé par 11 organismes financeurs de la recherche en Europe, dont l’ANR. Et c’est l’occasion d’en apprendre un peu plus sur le fameux Plan S élaboré par le chargé de mission pour l’open access de la Commission Européenne, Robert-Jan Smits (RJS). En effet, cette coalition s’engage sur l’objectif principal du Plan S, à savoir l’obligation de diffusion en accès ouvert, à compter du 01/01/2020, de toute la littérature de recherche financée par des fonds publics ; la diffusion pouvant se faire soit dans des revues en open access, soit sur des archives ouvertes.

Le Plan S se décline en 10 points (je résume) :

  • Les auteurs conservent leurs droits et diffusent leurs travaux sous une licence ouverte
  • Les financeurs vont définir des critères et un haut niveau de service pour qualifier les revues OA et les plateformes d’archives ouvertes labellisés
  • Les financeurs soutiendront la création de revues et de plateformes si besoin ; ils soutiendront également les infrastructures de l’open access
  • Les APC seront payés par les financeurs ou par les institutions (et pas par les individus)
  • Les APC seront standardisés et plafonnés au niveau européen
  • Les universités, organismes de recherche et BU devront aligner leurs politiques et leurs stratégies en la matière
  • Tous les produits de la recherche sont concernés par cette politique, même les ouvrages, bien que pour ceux-ci une tolérance soit accordée  au niveau du délai de mise en place
  • Le rôle des archives ouvertes pour la conservation à long terme des productions de recherche et pour l’innovation éditoriale est réaffirmé
  • Exit les hybrides : le modèle hybride n’est pas compatible avec les objectifs du plan S
  • Les financeurs feront une suivi du respect de ces règles et sanctionneront les manquements

Evidemment, les éditeurs ne voient pas ce plan d’un bon oeil : le refus des hybrides signerait la fin de la liberté académique du chercheur et freinerait la transition vers l’open access, le plan « saperait le travail de validation effectué par les revues de qualité » et ne serait « pas soutenable pour les revues du groupe Science », selon un porte-parole de l’éditeur.

PS : Pour quoi un plan « S » ? C’est « S » pour « Science, Speed, Solution, Shock », selon RJS.

Sources :
European science funders ban grantees from publishing in paywalled journals
Radical open access plan could spell end to journal subscriptions

Effet positif des mandats pour le green OA

4336201148_e66ac0db54_mContrairement à ce qui est avancé dans le rapport Finch, il semble bien que l’existence d’une obligation de dépôt dans une archive ouverte soit fortement corrélée avec le nombre de dépôts effectifs. C’est en tout cas la conclusion à laquelle arrivent des chercheurs canadiens et britanniques dans Testing the Finch Hypothesis on Green OA Mandate Effectiveness :
« … les obligations de dépôt en Open Access ont un impact majeur, et plus l’obligation est forte, plus cet impact est important (le mandat de l’université de Liège, qui lie le dépôt à l’évaluation des performances de recherche étant le modèle le plus « contraignant »). Le conseil de la recherche du Royaume-Uni (Research Council of the UK, RCUK), ainsi que toutes les universités, les institutions de recherche et de financement de la recherche au niveau international seraient bien inspirées de mettre en place de fortes obligations de dépôt dans les archives ouvertes et d’instaurer des mandats institutionnels et liés au financement de la recherche. »
Selon les auteurs, les obligations de dépôt permettent d’augmenter significativement le taux de publications en libre accès : pour le royaume-uni il serait proche de 40%, alors que le taux moyen tourne plutôt autour de 25%.
[photo : lissalou66]


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