Archive for the 'crise des périos' Category

Le désespoir comme booster

14970280808_40599a82ac_m« La question n’est pas de savoir si nous devons continuer à payer aux responsables de notre malheur tout ce qu’ils demandent pour répondre à nos besoins. Nous ne pouvons pas. Aucun budget de bibliothèque ne peut suivre la cadence des augmentations tarifaires pour les ressources essentielles.

La question est : est-ce que nous devons dépenser toutes nos ressources financières pour payer une fraction toujours plus réduite de ce que le système actuel demande ? En juste six ans, malgré des hausses de budget, le pouvoir d’achat de ma bibliothèque a baissé de 22%. Devons-nous dépenser la totalité de notre budget d’acquisition pour seulement 78% de ce que nous pouvions nous payer il y a 6 ans ? Devrons-nous utiliser ce budget entier pour acquérir ce qui ne sera plus que 73% des ressources l’an prochain, et 68% l’année d’après ? Devons nous manger la grenouille tous les ans pour toujours moins en retour ?

Ou bien devons nous saisir cette situation désespérée comme un moyen de nous en libérer en essayant de nouvelles choses ? Ce désespoir pourrait nous fournir l’excuse dont nous avons besoin pour financer des entreprises – si risquées soient-elles – qui risquent moins d’échouer que le système qui nous dérange actuellement. C’est peut-être précisément parce que les ressources financières diminuent que nous devons utiliser celles-ci pour de nouvelles initiatives ; notre désespoir peut être le moteur dont nous avons besoin pour faire des choix impossibles. »

Bryn Geffert, dans A librarian’s defense of despair : http://chronicle.com/blogs/conversation/2015/03/06/in-defense-of-librarians-despair/

[Photo : Jean-Jacques Bougeot]

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RWA : une nouvelle menace pour l’Open Access

Les éditeurs scientifiques et l’Open Access, ça n’a jamais été le grand amour. Et ce n’est pas près de s’arranger : le 16 décembre dernier, 2 députés américains ont déposé devant la Chambre des Représentants un projet de loi signifiant rien de moins que la fin des politiques publiques visant à garantir à tous l’accès aux résultats de la recherche financée sur fonds publics.
Le Research Works Act (HR3699), c’est son nom, établit notamment la règle suivante :

Aucune agence fédérale ne peut adopter, instaurer, maintenir, continuer ou s’engager de quelque manière que ce soit dans une politique, un programme ou toute autre activité qui :
(1) cause, permet ou autorise la dissémination sur le réseau de tout travail de recherche issu du secteur privé sans le consentement préalable de l’éditeur de ce travail ;
(2) exige que tout auteur actuel ou potentiel, ou l’employeur d’un tel auteur actuel ou potentiel, donne son assentiment pour la dissémination sur le réseau d’un travail de recherche issu du secteur privé.

Ce qu’on entend par « travail de recherche issu du secteur privé » est défini dans le projet comme :

… un article destiné à être publié dans une publication scientifique ou universitaire, ou quelque version que ce soit de cet article, qui ne soit pas un travail du gouvernement des Etats-Unis (tel que défini dans la section 101 du titre 17 du code des Etats-Unis), et qui décrive ou interprète un travail de recherche financé entièrement ou partiellement par une agence fédérale, et auquel un éditeur commercial ou à but non lucratif s’est engagé à apporter par sa contribution une valeur ajoutée, y compris la validation par les pairs ou la mise en forme. Cette expression ne concerne pas les rapports d’étape ni les données brutes régulièrement soumis directement à l’organisme financeur au cours de la recherche.

On rappellera juste que le travail de validation par les pairs, censé être la valeur ajoutée apportée par les éditeurs aux articles est assumé *gratuitement* par des chercheurs, payés eux aussi sur fonds publics…

C’est clairement la fin des mandats institutionnels qui est visée ici, à commencer par celle des National Institutes of health (NIH), qui conditionnent leur financement à l’obligation de dépôt des articles issus de la recherche sur PubMedCentral dans les 12 mois suivant la publication. Plus largement, ce sont toutes les politiques en faveur du libre accès qui se verraient ainsi remises en cause, si une loi de ce genre était votée.
On peut l’imaginer, l’American Association of Publishers (AAP), qui compte parmi ses membres éminents la plupart des éditeurs scientifiques internationaux, se frotte les mains et appuie bien évidemment l’initiative :

Les éditeurs américains mettent plus d’information de recherche à la disposition de plus de gens, via plus de canaux de diffusion que jamais dans l’histoire. Dans une période où la sauvegarde des emplois, les exportations, l’excellence académique, l’intégrité scientifique et la protection des droits d’auteur numériques sont toutes des priorités, le Research Work Act garantit la viabilité de cette industrie.

Et ce n’est que pure coïncidence si le projet de loi est défendu notamment par Carolyn Maloney, députée démocrate de l’état de New-York – un état qui abrite pourtant de nombreuses universités et structures de recherche publique –, qui a été destinataire pour sa campagne de plus du tiers des dons attribués par Reed-Elsevier (certains ont également relevé la surprenante similitude entre la réponse de la députée aux critiques formulées à son encontre et certaines interventions du responsable des relations publiques d’Elsevier).
La position de l’AAP ne fait cependant pas l’unanimité : certains éditeurs ont exprimé leur désaccord avec l’appui apporté par l’association à cette législation. Parmis ceux-ci,  on trouve des presses universitaires (MIT Press , University of California Press…), mais aussi Ithaka (l’organisme qui est derrière JSTOR et Portico), Nature Publishing ou encore Cambridge University Press.
Des bibliothécaires américains se mobilisent : certains demandent aux éditeurs de se positionner contre le projet de loi, voire de quitter l’AAP, une autre a commencé à lister tous les membres des comités éditoriaux des revues en sciences de l’information éditées par Elsevier, et leur enjoint de démissionner de leur poste dans ces comités. On peut effectivement se demander si, du point de vue du chercheur, oeuvrer pour la diffusion la plus large possible des connaissances est réellement compatible avec une collaboration de quelque nature que ce soit avec des revues dont l’accès n’est pas libre ? (Je parle d’un point de vue purement éthique, hein, je sais que la réalité est autre, qu’il y a la pression du « publish or perish – et plutôt dans des revues à fort facteur d’impact » qui conditionne l’avancement de la carrière du chercheur, que « publier dans des revues en open access, c’est risqué » (quel risque ? à part celui d’être lu, je ne vois pas), etc.)
Bref, il me semble juste qu’il serait bon de ne pas oublier que « Sans la recherche, il n’y aurait rien à publier. » (dixit Paul Courant, dans un billet de 2008 à propos du Fair copyright in research works act, une tentative précédente de limitation de l’accès aux résultats de recherche).

Pour suivre les évolutions de ce projet, quelques liens :
– le billet de John Dupuis sur Confessions of a science librarian : Around the Web: Some posts on The Research Works Act (Now chronological!)
– le blog Open and shut ?
– les infos diffusées par Peter Suber sur son compte Google+
– le billet de Peter Murray-Rust The Scholarly Poor could lose access to scientific research; this is serious
la catégorie Scholarly communication sur Gavia Libraria
[photos : oneshotonepic]

Machine à (garder ses) sous

L’étude The value of UK HEI’s to the publishing process du JISC s’est penchée sur le coût des publications scientifiques pour les établissements d’enseignement supérieur et de recherche du Royaume-Uni, sachant que :
– la communication scientifique ne peut pas se passer du peer-review
– le peer-review est réalisé gratuitement par les chercheurs
– le nombre d’articles scientifiques est en augmentation constante, et donc le peer-review aussi.
Elle arrive à des chiffres non négligeables :
– le travail de peer-review est estimé à entre 110 et 165 millions de £
– la participation à des comités éditoriaux représente 30 millions de £
Si l’on ajoute à cela la dépense annuelle des établissements consacrée aux abonnements en ligne, pour pouvoir consulter les articles de revues, estimée à entre 113 et 121 millions de £, la facture se monte annuellement à entre 253 et 316 millions de livres sterling, ie entre 300 et 400 millions d’euros.
Avec de telles sommes, les établissements ne pourraient-ils pas mettre en place un système de production, de diffusion et de conservation de l’information scientifique ? C’est ce que propose Brad Wheeler, de l’Université de l’Indiana dans cet article d’Educause Review, avec « the Big Digital Machine », un concept en cours d’élaboration au sein du Committee on Institutional Cooperation, un consortium d’universités du nord ouest des Etats-Unis. Le principe est que si les établissements se réapproprient leur recherche, ils seront en mesure d’en définir les modes d’accès, aussi bien en terme de droits qu’en termes techniques – l’idée c’est aussi de s’appuyer sur les outils existants, qui ont fait leurs preuves, comme Open Journal Systems (OJS), Fedora/DSpace/DuraSpace, Connexions, EPrints pour pouvoir gérer la totalité du workflow des publications. Une infrastructure de ce type pourrait fédérer aussi bien les sociétés savantes que les presses universitaires, voire les « petits » éditeurs pas encore passés au numérique. Tentant…

[Photo : cobalt123]

Sortir des big deals ?

« Le marché des revues scientifiques se caractérise par une délégation des achats, des indicateurs de demande pas fiables, et des produits complexes et difficiles à évaluer. La demande de revues est par conséquent très peu élastique en ce qui concerne les prix. De grands éditeurs commerciaux ont capitalisé sur cette demande non-élastique, en réduisant la concurrence à travers des fusions et des regroupements, en proposant des contrats couplés (les « big deals »), et en augmentant leurs prix bien au delà des coûts moyens. Selon nous, la demande pour de l’accès à des articles de revues serait bien plus élastique, et le coût global pour la communauté universitaire plus faible, si les universités cessaient d’acheter des licences de site pour des bouquets à des prix excédent largement le coût moyen. Tant que d’autres bibliothèques continueront d’acheter des licences à des prix gonflés, une université à elle seule ne peut espérer un changement de la structuration des prix en supprimant elle-même ses licences de type « big deal ». Quelques bibliothèques sont pourtant parvenues à faire des économies substantielles en négociant férocement. D’autres, comme Stanford et le California Institute of Technology, ont économisé encore plus en rejetant les contrats couplés et en ne s’abonnant plus qu’aux revues individuelles les plus rentables. »

Ted C. Bergstrom. « Librarians and the terrible fix: economics of the Big Deal » Serials 23.2 (2010): 77-82.
[photo : galoshes]

BBQ season : Nature sur le grill

Dans une lettre ouverte adressée il y a quelques jours à leurs enseignants et à leurs chercheurs, la California Digital Library (qui gère – entre autres – les négociations avec les éditeurs pour les ressources électroniques), les bibliothèques universitaires et la Commission Universitaire pour la Communication Scientifique de l’Université de Californie (UC) les informent d’un possible boycott des revues de l’éditeur Nature Publishing Group (NPG). Pourquoi ? Oh, simplement parce que « NPG veut augmenter le tarif de [notre] licence pour la revue Nature et ses revues affilées de 400% en 2011, ce qui porterait le coût de leurs 67 revues à plus d’1 million de dollars par an ».
Ils encouragent en plus lesdits enseignants et chercheurs :
– à refuser de valider des articles pour les revues de NPG
– à cesser de soumettre des articles aux revues éditées par NPG
– à arrêter de promouvoir leurs postes vacants dans les revues du groupe
– à diffuser largement leur avis sur les pratiques commerciales de NPG auprès de leurs collègues, y compris (et surtout) en dehors de leur propre université.
Pour les signataires, c’est également une occasion de sensibiliser les enseignants et les chercheurs au fait que le modèle économique traditionnel de l’édition scientifique est corrompu, et qu’il ne tient qu’à eux de le changer : ils les incitent, par exemple, à publier dans des revues en open access, à déposer dans l’archive institutionnelle de l’université, ou à veiller à ce que les licences passées avec les éditeurs leur permette de garder leur droit d’auteur.
Nature a répondu à ce courrier, en précisant qu’en fait l’UC bénéficiait jusque là d’un tarif avantageux qui lui était spécifique : rendez-vous compte, une remise de 50% par rapport au tarif public ! Sauf que, n’importe quel responsable de la documentation électronique vous le dira : PERSONNE ne paye le tarif public, et tout est affaire de négociations. Pour l’éditeur cette augmentation n’est donc qu’une remise à plat par rapport aux autres clients, mais, dans les réactions apparues dans la blogosphère à la suite de ces annonces, aucun bibliothécaire ne s’est félicité de ce rattrapage qui mettrait tous les clients de Nature au même niveau. Non, bizarrement, les bibliothécaires soutiennent plutôt la position de l’UC, et attendent de voir si la menace de boycott va avoir un effet sur la suite des négociations… Plusieurs observateurs remarquent que cette initiative est une occasion d’étendre le débat à la remise en question des modèles de diffusion et d’évaluation de la recherche scientifique (ici ou ), certains pensant qu’il faudrait aller plus loin, en instaurant un moratoire sur l’utilisation de l’impact factor par les commissions de recrutement dans les universités (Adventures in ethics and science) par exemple. D’autres soulignant l’aberration d’un système dans lequel une université qui contribue de manière non négligeable à la production des contenus des revues (plus de 5300 articles publiés dans les revues du groupe au cours des 6 dernières années émanent de chercheurs de l’UC, dont près de 700 pour la seule revue Nature) n’a finalement pas les moyens d’accéder à ces contenus…
L’université a répondu à cette réponse, en s’appuyant sur le fait que les autres négociations qu’elle mène avec d’autres éditeurs, plus compréhensifs sur les réductions budgétaires dont souffrent les bibliothèques dans cette période de  crise économique (voir la déclaration de l’ICOLC sur les impacts de la crise sur les licences consortiales), lui ont permis de limiter les désabonnements : accepter le deal proposé par NPG annulerait les économies réalisées, et décrédibiliserait le travail accompli avec les autres éditeurs.
Par ailleurs, l’université revient dans cette réponse sur un élément fondamental dans tout acte d’achat, à savoir la valeur du produit :
« Comment on détermine la valeur est une question complexe. Les bibliothèques de l’UC ont vraiment passé beaucoup de temps à étudier la question. Nous sommes certes d’accord sur le fait que NPG publie des articles de très grande qualité, mais c’est le cas de beaucoup d’autres éditeurs, et ce à des coûts plus raisonnables. La fiche synthétique jointe à notre courrier aux enseignants-chercheurs montre que le coût moyen actuel des revues NPG est bien dans la norme de ce qui est dépensé pour d’autres ressources par l’UC, alors que la nouvelle proposition tarifaire les placerait dans une position anormalement élevée. Alors que nous ne mettons pas en question le fait que le coût d’usage des revues NPG à l’UC est bas, les caractéristiques de ces revues doivent aussi être prises en compte, histoire de comparer ce qui est comparable. Comme de nombreux observateurs ont pu le constater (y compris sur la plateforme de Nature, comme Andrew Odlyzko), le coût marginal pour un éditeur de l’augmentation des usages en ligne est très bas, comparé au coût du premier exemplaire. Il existe de nombreux facteurs externes qui entraînent les usages dans l’environnement numérique actuel, dont peu ont un lien avec la structure des coûts internes de l’éditeur. Nous sommes impatients de travailler avec NPG pour arriver à une évaluation juste de la valeur dans la suite de nos discussions. »
Enfin, l’UC interpelle NPG à propos des heures passées gratuitement par ses personnels à évaluer la qualité scientifique des contenus proposés dans les revues (peer-review) ou a participer à des comités éditoriaux : dans quelle mesure pourraient-elles être prises en compte dans le calcul tarifaire, en compensation ?
Pour Dorothea Salo, la suite promet d’être éclairante sur bien des points : l’UC est-elle prête à aller au clash même si elle arrive à négocier un taux d’augmentation plus bas ? D’autres universités pourront-elles / vont-elles suivre ? L’importance des revues en terme d’outils d’évaluation ne va-t-elle pas en prendre un coup ? Est-ce que tout ça va vraiment bénéficier à l’Open Access et aux archives ouvertes ?
A suivre, donc…
[photos : kilgub, essgee]

L’art de la suppression

3604199703_24b0d7d21e_m.jpgDans Notes from a catastrophe : easing the pain of budget cuts, Barbara Fister propose quelques conseils pour faire des suppressions d’abonnements sans trop de heurts en ces temps de crise :

– Transparence : Communiquer régulièrement sur les raisons de ces suppressions, pour faire comprendre à la communauté ce qui se passe réellement dans le monde de l’IST – et pour éviter d’être soupçonné de mauvaise gestion, accessoirement…

– Collégialité : Associer les enseignants-chercheurs aux choix des titres à supprimer, tout en gardant l’autorité pour la décision finale – personne n’a dit que ce serait simple… 😉

– Equité : Il est important de tenir compte de la taille de chaque département, mais il est tout aussi important que chacun participe à l’effort global.

– Expertise : Les enseignants-chercheurs accepteront mieux les décisions de suppressions s’ils reconnaissent aux bibliothécaires une expertise pour tout ce qui concerne les ressources d’information, quel qu’en soit le support, et les services qui y sont associés (la formation par exemple). Cela suppose de promouvoir régulièrement les bibliothèques et leurs activités.

– Culture locale : Avoir une bonne connaissance du fonctionnement des structures de son établissement, y compris au sein des disciplines (connaître les personnes-relais).

– Pertinence : Discuter avec les enseignants pour définir ce qui est utile, comparer avec ce qui est utilisé ; détecter les besoins éventuels en formation des étudiants.

– Faire le premier pas : Commencer par supprimer ce qui peut l’être dans les journaux et magazines, avant consultation extérieure.

– Aide à la décision : Mettre en avant une pré-sélection de titres (couvrant des thématiques qui ne sont plus enseignées, dont les contenus sont disponibles en OA dans un délai raisonnable…). Proposer de substituer des titres par d’autres.

– Formation : Profiter de la discussion pour sensibiliser les enseignants aux enjeux de la communication scientifique globale, et promouvoir l’Open Access comme une alternative solide.

[photo : marestra]

Effets de crise

3166734228_7cc6e524d1_m.jpgLes temps sont durs, et la crise touche petit à petit la chaîne de la communication scientifique, si j’en juge par ces informations :

– 7 bibliothèques universitaires de l’American Research Libraries (l’équivalent de notre ADBU, grosso modo) annoncent des coupes franches dans leurs budgets pour 2009 et 2010 minimum ; entre 200 000$ et 1 400 000$ selon les établissements, qui ne sont pas les moins prestigieux : Cornell, Yale, UCLA, MIT notamment – Serions-nous mieux préparés en France, nous qui n’avons pas vraiment l’habitude de gérer l’abondance de moyens financiers ? 😉

– A l’autre bout, de petits éditeurs (sociétés savantes et presses universitaires) s’inquiètent – à juste titre – d’être les premières victimes de ces réductions massives, et proposent bravement de ne pas augmenter leurs tarifs en 2010. L’élément principal en leur défaveur : les 3 grosses multinationales de l’édition scientifique, qui représentent le plus souvent la part la plus importante de la dépense des bibliothèques, concluent des contrats pluri-annuels et basent leur tarification sur le maintien d’un portefeuille d’abonnements minimum, ce qui élimine toute marge de manoeuvre. Sauront-ils voir plus loin que leurs profits records et entendront-ils les recommandations de l’ICOLC pour une gestion « durable » par temps de crise ?
[photo : fiber!]

Il est libre, Max

2e3260ef4b7caa58667996439fda8d95.jpgLa Max Planck Society, qui est, en gros, l’équivalent allemand de notre CNRS, vient d’annoncer qu’elle ne renouvellera pas en 2008 son abonnement aux 1200 titres de l’éditeur Springer. « Une évaluation des statistiques d’usage et des comparaisons avec d’autres grands éditeurs ont montré que Springer demandait pour ses revues environ le double du prix considéré comme acceptable par la Max Plack Society. »
La Max Planck Society est l’une des institutions à l’initiative de la Déclaration de Berlin, acte de naissance du mouvement de l’Open Access. Je trouve donc cela assez cohérent, comme action.
[credit photo : jpctalbot]

A contresens

« Il semble de plus en plus urgent que la problématique du libre accès aux données scientifiques soit intégrée aux réflexions qui guident les politiques publiques. En décidant de s’appuyer exclusivement sur la diffusion payante, le CNL donne priorité à des raisonnements qui viennent du papier. Quand des cartons de numéros s’accumulaient dans les stocks des éditeurs, quand la mise au pilon semblait l’inéluctable issue des plus anciens numéros, quand la diffusion gratuite faussait totalement les chiffres de diffusion générale et ne permettait pas de révéler le moindre désir (pour reprendre le mot de Sophie Barluet [rédactrice du rapport]) et encore moins le moindre usage (les revues sont-elles destinées à couvrir des murs ou à être lues ?), on peut s’interroger sur ce complexe du Cyclope. Comment expliquer l’absence de prise en compte de l’hypothèse de la Longue traîne, si fréquemment citée par les professionnels réfléchissant au marché du numérique, et la mise à l’écart de la problématique des usages et des mesures des pratiques de lecture. Ne lit-on vraiment que dans les bibliothèques universitaires et les appartements des derniers particuliers abonnés aux revues, au coin du feu ? Les lectures numériques ne peuvent-elles pas être mesurées et comparées aux lectures analogiques ? Ne peut-on, ne doit-on pas, un jour, confronter les deux univers, les combiner, étudier leurs complémentarités, mesurer l’efficacité réelle de chaque diffusion ? Ne peut-on, ne doit-on pas, très vite, réfléchir aux passerelles entre électronique et papier ?« 
Marin Dacos à propos du rapport sur les revues françaises remis au Centre National du Livre en juillet dernier.

Démission & suppressions

Ted Bergstrom vient de faire passer via Liblicense le courrier de démission de Max Steuer, enseignant et accessoirement responsable éditorial pour une revue d’économie publiée par Emerald. Alerté notamment par les publications de Phil Davis sur les pratiques de re-publication multiple d’Emerald découvertes l’an dernier, Max Steuer s’est rendu compte que travailler gratuitement pour cette revue confidentielle (qui n’a même pas d’impact factor) facturée à environ 6 000£ par an ne servait pas vraiment l’intérêt de la science ni sa communication au plus grand nombre : « … la politique tarifaire de cette revue n’était pas compatible avec la culture et les pratiques de la communauté universitaire. C’est une erreur de ma part de ne pas m’en être préoccupé avant d’accepter le poste. Je supposais simplement que les coûts et le reste de la politique éditoriale correspondaient en gros au standards du milieu académique. Il s’avère que ce n’est pas le cas ».
Par ailleurs, les bibliothèques de l’Université de Louisville, Kentucky, annoncent un déficit d’environ 500 000$ (sur un budget global de 7 millions de $) pour l’année 2006, et donc des suppressions d’abonnement papier et électronique à prévoir, si elles n’obtiennent pas de financement supplémentaire. Un bibliothécaire rappelle que « les versions électroniques peuvent grimper de 10 à 40% par an, alors que les abonnements papier augmentent avec constance de 10% annuellement ».

[Infos via Liblicense, OAN, et mon portrait en simpson (vous ne m’aviez pas reconnue ?) sur le simpsomaker]


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