Vu sur l’édition 2012 du Rapport de l’International Publishers Association sur la TVA sur les livres (merci à GC pour le signalement) :
« En 2012, 45% des pays analysés n’accordent aucune exemption ni aucun taux réduit pour les publications électroniques, un pourcentage qui reste inchangé par rapport à 2011. Ce traitement fiscal discriminatoire entre livres imprimés et électroniques se poursuit en violation des recommandations et des études comparatives de l’OCDE, qui préconisent une politique non-discriminatoire et l’application d’allègements sur les publications numériques. Comme l’usage de livres électroniques augmente particulièrement rapidement dans les pays du marché anglophone, et commence à être adopté dans d’autres pays, il devient vraiment urgent de se saisir de cette question. »
En effet, car les conséquences de cette TVA inadaptée sur le livre électronique sont multiples :
– maintien de coûts élevés sur des ressources que les lecteurs s’attendent à payer moins chers et dont les auteurs espèrent retirer un bénéfice plus important
– recul des initiatives pour le développement du numérique, dans l’éducation notamment
– pénalisation des lecteurs handicapés (qui ne peuvent pas, selon le handicap, utiliser de livres imprimés)
L’argument avancé le plus fréquemment par les tenants d’un fort taux de TVA étant la difficulté à repérer les livres électroniques parmi le reste des contenus numériques, on en revient à l’importance de bien définir ce qu’est un livre numérique (comme cela a déjà été évoqué lors des journées Couperin sur les e-books). Le rapport mentionne la définition utilisée par la ville de New-York, où un « produit » (ie un livre électronique) remplissant les conditions suivantes ne doit pas être taxé :
« a) L’achat du produit n’ouvre pas au lecteur l’accès à d’autres biens ou services, et toutes les révisions apportées au livre électronique sont limitées à la correction d’erreurs
b) Le produit est fourni sous la forme d’un téléchargement individuel
c) Le produit est vendu et promu en tant que livre électronique ou tout terme similaire
d) Si l’usage du produit nécessite que celui-ci soit mis à jour, ou bien fasse l’objet d’une édition nouvelle ou révisée occasionnellement, les mises à jour ou la nouvelle édition ou l’édition révisée ne doivent pas être effectuées plus d’une fois par an
e) Le produit n’est pas conçu pour fonctionner avec un autre logiciel que celui destiné à la lecture (que ce soit sur un Kindle, un Nook, un Ipad, un Iphone ou un ordinateur) »
Le rapport réaffirme en conclusion la nécessité d’aligner la fiscalisation des e-books sur celle des livres imprimés.
[photo : s_falkovw]
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Journée d’étude Couperin e-books 2012 – Atelier juridique
Published 17/04/2012 Confs & journées d'études , e-book 4 CommentsTroisième et dernière partie du compte-rendu de la journée e-books Couperin, consacrée à l’atelier juridique (voir la première partie sur les retours d’expériences, la deuxième partie sur le signalement).
Intervenants : Sébastien Respingue-Perrin, SCD Paris Dauphine et Dominique Rouillard, BPI
A l’origine de la loi sur le prix unique du livre numérique, il y a une demande des éditeurs pour une décote du prix, afin que l’achat d’un livre numérique soit plus attractif, et stimule le développement d’une offre francophone. Au début de la discussion (2008-2010) , le livre numérique c’est le livre homothétique. En isolant le segment éditorial du livre numérique, on peut mieux encadrer sa diffusion. La baisse de la TVA à 7% (depuis le 01/01/2012) permet d’aligner la taxation du numérique sur celle du papier (entrée en vigueur au 01/04/2012).
Qu’est-ce qu’un livre numérique ?
La question se pose très pragmatiquement ; en effet, il existe à l’heure actuelle 2 définitions réglementaires fiscales différentes du livre électronique :
– Celle de la loi 2011-590 du 26 mai 2011, dite « loi PULN » : « La présente loi s’applique au livre numérique lorsqu’il est une œuvre de l’esprit créée par un ou plusieurs auteurs et qu’il est à la fois commercialisé sous sa forme numérique et publié sous forme imprimée ou qu’il est, par son contenu et sa composition, susceptible d’être imprimé, à l’exception des éléments accessoires propres à l’édition numérique », définition détaillée dans le décret d’application 2011-1499 : « Les éléments accessoires propres à l’édition numérique mentionnés […] s’entendent des variations typographiques et de composition, des modalités d’accès aux illustrations et au texte telles que le moteur de recherche associé, les modalités de défilement ou de feuilletage des éléments contenus, ainsi que des ajouts de textes ou de données relevant de genres différents, notamment sons, musiques, images animées ou fixes, limités en nombre et en importance, complémentaires du livre et destinés à en faciliter la compréhension. »
– Celle de l’article 278bis du Code Général des Impôts, qui fixe le taux de TVA applicable, précisée dans le rescrit fiscal n°2011/38, qui ignore toute référence aux « éléments accessoires » enrichis du décret.
Toute la question est de savoir si le livre numérique est considéré fiscalement comme un livre (avec une TVA à 7%) ou comme un service (avec une TVA à 19.6%) : les définitions, on l’a vu, sont floues voire contradictoires en ce qui concerne les « oeuvres multimédia », envisagées par le décret mais exclues selon le rescrit – dans ces termes, quid du livre enrichi ? Ou des « sites compagnons » adossés aux manuels ?
Qu’est-ce qu’un prix unique ?
Le prix unique est un prix public : tout détaillant vendant à un acheteur établi en France a l’obligation de vendre à un prix affiché (pour les institutions, des barèmes détaillant le contenu des offres doivent être accessibles). Il amène plus de transparence (mais les fournisseurs vont-ils jouer le jeu et proposer des offres diversifiées ?), et est opposable (on peut s’y référer en cas de désaccord).
Le prix unique n’est pas un prix fixe : il peut varier en fonction des offres commerciales (offres groupées vs vente au titre), mais il est non négociable. Il existe cependant une possibilité de réintroduire une part de négociation pour les bibliothèques : en effet, la loi prévoit une exception permettant de conserver une ouverture pour les négociations, à la condition que les offres concernent des ouvrages acquis dans un cadre de recherche ou d’enseignement supérieur d’une part, et qu’ils soient intégrés dans des plateformes hébergeant d’autres types de contenus d’autre part. Les 2 conditions doivent être remplies : ainsi, les fournisseurs ne proposant que des livres numériques, même s’ils sont spécialisés dans l’édition universitaire, sont désormais soumis au prix unique. Cette exception, si elle paraît positive pour les BU et les bibliothèque de recherche, met les bibliothèques de lecture publique dans une situation inconfortable, déjà dénoncée dans ce communiqué de l’IABD.
Comment situer le livre électronique dans les marchés publics (quel périmètre) ?
Jusqu’ici, l’accès aux ressources numériques reposait sur le paiement d’un surcoût, s’ajoutant au prix des ressources imprimées, ce qui permettait (en théorie) de rester en dessous des seuils de passation de marchés publics formalisés.
Avec le PULN, on rencontre finalement les mêmes difficultés qu’avec le livre papier : la mise en concurrence des fournisseurs se fait par rapport aux services supplémentaires proposés (qui doivent être identifiés et valorisés économiquement), car le critère prix devient inopérant [c’est moi qui extrapole]. A cela s’ajoute le fait qu’il ait peu d’acteurs économiques sur le marché, ce qui n’incite pas les fournisseurs à proposer des tarifs avantageux pour les bibliothèques.
Comment articuler les offres négociées dans le cadre d’un marché public ?
Avant le PULN, on pouvait imposer au fournisseur la gestion des offres consortiales. Avec le PULN, ce n’est plus le cas, ce sont les services associés qui représentent la marge de manoeuvre sur laquelle va porter la négociation. Du coup la « remise Couperin » disparaît, puisqu’elle est censée apparaître dans le barème public de l’éditeur. L’enjeu devient vraiment de faire rentrer les usages propres aux bibliothèques (conditions de prêt, possibilités d’impression…) dans la négociation pour arriver à adapter le tarif aux besoins – d’où l’importance de définir finement en amont lesdits besoins, en tenant compte des usages des lecteurs et de l’offre éditoriale.
Quel est le rôle de la licence dans un marché ?
La licence n’est pas contractuelle dans un marché, c’est dans le cahier des charges que sont définis les usages et fixées les conditions, ce qui est un avantage. Le marché doit également préciser les droits d’exploitation minimum qui sont dévolus à l’établissement : le livre numérique est une œuvre de l’esprit, soumise aux droits des auteurs et des ayant-droits, or la diffusion en bibliothèque est un droit de représentation, il convient donc de se prémunir contre les situations absurdes dans lesquelles la bibliothèque pourrait acheter des livres numériques mais pas les communiquer à ses lecteurs.
Conclusions
De nombreuses questions restent en suspens :
– Le rôle des consortia apparaît particulièrement bousculé par la loi sur le prix unique du livre numérique, et ce malgré la fenêtre de l’exception recherche… Quel avenir pour les négociations ?
– On a évoqué à plusieurs reprises au cours de la journée le modèle PDA (patron-driven acquisitions), ie les acquisitions déclenchées par les usagers (au bout d’un nombre pré-défini de consultations sur le catalogue de l’éditeur ou de l’agrégateur) : très concrètement, on peut se demander dans quelle mesure ce modèle est réellement « implantable » en France aujourd’hui.
– Va-t-il y avoir convergence des modèles économiques « grand public » et institutionnel ?
– Quid des offres qui ne rentrent pas dans les cases prévues par la loi ? (par exemple la Bibliothèque numérique Dalloz, qui propose un bouquet d’ebooks localisé sur la même interface que les bases de données et les revues du même éditeur, mais qui est commercialisé séparément)
– Comment faire cohabiter différents types de documents (livres enrichis, sites compagnons, livres homothétiques) dans les collections, dans le respect des règles de l’achat public ?
– La notion de droit de prêt des livres numériques reste encore assez floue aux Etats-Unis (ex. de MacMillan qui oblige au rachat d’un exemplaire au bout de x consultations), elle est quasi-inexistante en France : certains pionniers de l’édition numérique ouvrent des pistes, on aimerait que les « gros » éditeurs s’y mettent aussi…
[Photos : thinkretail, neilio]
Journée d’étude Couperin e-books 2012 – Atelier signalement
Published 15/04/2012 Confs & journées d'études , e-book 8 CommentsDeuxième partie des compte-rendus de la journée e-books organisée par Couperin : l’atelier sur le signalement des ebooks (voir la 1ère partie).
Valoriser ses livres électroniques : Caroline Bruley, Mariette Naud-Betteridge
Beaucoup de questions dans cet atelier, nécessaires à la réflexion à mener pour tout projet de signalement des ressources électroniques, à mon avis, mais d’autant plus essentiel pour les livres numériques, dont l’usage reste marginal pour l’instant.
Comment signaler : titre à titre ou bouquet ? Dans le catalogue ou dans un autre outil ? Dans le monde physique ou seulement par voie électronique (réseaux sociaux…) ?
Consensus actuellement sur le fait de tout mettre dans l’OPAC, mais quelle est la réelle valeur ajoutée ?
Doit-on regrouper le papier et l’électronique ? Comment cataloguer (question de la qualité des données fournies par l’éditeur) ? Quid des tablettes et smartphones ?
Présence physique : rappeler l’existence de l’électronique sur les supports papier ?
Comment mesurer l’impact de ces actions de valorisation ?
Signaler dans l’OPAC / le SIGB
SUDOC : le signalement ne va pas de soi : 2 bouquets seulement (Springer et Que sais-je?), et problèmes de mises à jour des bouquets : la question n’est pas réglée par l’ABES, qui travaille cependant à l’élargissement à d’autres bouquets. Une solution envisagée par l’ABES serait de supprimer les exemplaires créés automatiquement puis de réexemplariser tout le monde en se basant sur une liste de ppn valides. C’est un pis-aller, qui ne règle absolument pas la question de la mise à jour des données (à quand une base de connaissance nationale ? #jdcjdr…)
Pour recenser les titres électroniques, plusieurs solutions différentes ont été adoptées par les bibliothèques :
– Signalement complet dans le Sudoc puis localement (très lourd dans la mise en place et dans les mises à jour) ; possible dans le cas d’une collection modeste.
– Signalement « light » : notices succinctes
– Récupération de notices auprès de l’éditeur (service payant ou gratuit selon les éditeurs), mais pas forcément pratique à intégrer dans le catalogue (problèmes d’encodage par exemple).
Bref on fait comme on peut, et selon les bouquets, plusieurs solutions peuvent cohabiter en fonction de l’offre. Beaucoup de bricolage, pas de solution parfaite.
Signaler sur le site web et l’ENT
Page dédiée dans l’ENT à St Etienne, signalement régulier dans les actualités à Lyon 2
Signaler sur les réseaux sociaux
Facebook : page dédiée pour la bibliothèque numérique à Grenoble 1
Signaler via les listes de diffusion
Mailing auprès des contacts dans les labos, newsletter, liste sur inscription, infos envoyées 2 fois par mois, collant à l’actualité
Rematérialisation
Matérialisation dans les rayonnages : sous la forme de flyers (cadres plexi), d’affiches, de fantômes (pour certains types de documents, les manuels notamment), de QR codes sur les exemplaires papier à Lyon 2 (déjà utilisé pour les revues électroniques avec succès), d’autocollants. Les QRcodes comportent des liens vers la notice, mais il n’est apparemment pas possible de lier vers le texte intégral (frein), possibilité de créer des url authentifiées (Paris 5 l’a fait pour Cairn). Et ça marche dans les 2 sens : papier > électronique et électronique > papier.
En résumé, le signalement doit se faire partout, tout le temps. Nécessité de former les usagers, mais aussi les agents (pour répondre aux questions concrètes des usagers) – les établissements ayant répondu témoignent d’une forte demande des agents pour des formations récurrentes. Il faut veiller à ne pas introduire une autre fracture numérique dans les équipes (qui engendrerait des difficultés en terme de management) ; il est important d’impliquer les mêmes personnes pour les achats de livres papier et de livres électroniques.
Retour d’expérience à l’EPFL (T. Guignard)
Cette école d’ingénieurs suisse propose une offre de 40 000 ebooks en sciences de l’ingénieur. L’anglais n’est pas un problème, car présent dans les cursus.
Démarrage en 2005 : signalement par une liste indépendante du catalogue.
2006 – 2011 : catalogue collectif sur lequel l’école n’a pas de maitrise ; d’où le développement d’une base locale pour signaler tous les ebooks (sur FileMakerPro). Mises à jour par lot, avec les listes de titres fournies par les éditeurs (retravaillées avant intégration). Inconvénients : l’usager doit choisir le support avant de lancer sa requête, et pas de lien entre les bases.
Solution de tout mettre dans l’opac :
Possible d’intégrer des notices MARC en masse, mais nécessite de modifier toutes les notices à la main (catalogue collectif). Les titre à titre sont catalogués à la main, ainsi que les titres les + demandés. Travail avec un plugin firefox qui permet de repérer les ebooks : pratique mais problème d’utilisation avec les ISBN multiples, et nécessite l’installation du plugin.
Solution des Discovery tools :
Tests grandeur nature en 2011 de 4 outils de découverte du marché : Ebsco Discovery Tool, Summon, Primo, Worldcat local : grosse déception, en raison des données incomplètes, des bases de connaissances pas à jour (+ de 6 mois de retard), de la perte de données locales, du manque de liens vers l’OPAC, de l’absence de dédoublonnage.
Solution adoptée :
GoogleScholar + Swissbib (métacatalogue basé sur Worldcat, moissonne les catalogues des BU de sciences de Suisse) : correspond mieux aux attentes.
La base de données locale est en train d’évoluer, le développement d’un outil commun avec l’UNIL est en cours.
Mais il faut être vigilant sur les points suivants : la séparation des bases n’est pas une solution acceptable (intégration d’une base d’articles pour émuler les fonctionnalités type discovery tool), et le mélange entre livre / livre élec / article ne fonctionne pas pour les utilisateurs (au niveau des résultats, il faut séparer livres et articles).
A cette solution s’ajoutent :
– le signalement dans les nouveaux média : twitter, rss, diigo (ciblage par domaines)
– des actions de rematérialisation : affichage dans les rayonnages, QR codes collés sur les ouvrages
TG souligne l’importance de mesurer les usages de ces outils (encodage des QR codes de façon à pouvoir les repérer dans les stats), même s’il n’est pas facile d’évaluer l’impact de cette valorisation (les outils et mesures changent).
[Photos : Stig Nygaard, timtom.ch]
Journée d’étude Couperin e-books 2012 – Intro et retours d’expérience
Published 14/04/2012 Confs & journées d'études , e-book 3 CommentsLe consortium Couperin a organisé sa journée sur les e-books cette année sur le thème de « L’intégration du livre électronique dans l’écosystème de l’établissement« . J’ai été invitée, avec mon compère Gaël Revelin, à faire un compte-rendu de cette journée.
Keynote : Hervé Le Crosnier
Chez Couperin, on ne se refuse rien 😉 : c’est Hervé Le Crosnier himself (ses cours, sa maison d’édition) qui était invité en tant que grand témoin pour introduire et conclure la journée.
La question fondamentale, qui est revenue à plusieurs reprises au cours de la journée, est celle de la nature du livre numérique, de sa définition : « qu’est-ce qu’un livre numérique ? ».
HLC a évoqué plusieurs des problématiques liées au livre numérique :
– Transformation du média précédent (le livre numérique n’est pas forcément en concurrence avec ce qui va rester du livre papier)
– Secteurs privilégiés (domaine public, manuels, livres expérimentaux (publie.net, « l’homme volcan » de M. Malzieu), livres auto-édités)
– Manque de normalisation (parallèle avec la « guerre des navigateurs », maintenant c’est la « guerre des liseuses ») alors que l’interopérabilité est et sera de plus en plus une nécessité
– Modèles économiques : avant de s’intéresser aux utilisateurs, on se préoccupe des modèles économiques et on légifère (PULN) – alors qu’on n’en sait pas assez sur le livre numérique pour pouvoir fixer des règles intangibles, les modèles actuels sont forcément transitoires.
– Question du prêt des livres numériques : Amazon dit oui, et se prétend ainsi bibliothèque. Or la bibliothèque c’est aussi la garantie de la pérennité des collections, le libre choix des modes de consultation des contenus, l’assurance de l’anonymisation des usages. La chronodégradabilité mise en oeuvre via les DRMs renvoie à la perte de confiance du système de diffusion des savoirs vis à vis du lecteur (lecteurs = voleurs de la culture)
In fine, HLC préconise de garder à l’esprit les fondamentaux du métier de bibliothécaire : la constitution de collections, avec la liberté de choisir en fonction de son public, et la diffusion des savoirs pour former des citoyens éclairés. Il est avéré que la gratuité favorise l’émancipation ; reste à inventer un nouveau modèle prenant en compte le partage. On a des fondamentaux et de l’imagination : ne nous bridons pas.
Retour d’expériences : Université du Havre, Pierre-Yves Cachard
Cette petite université pluridisciplinaire (7000 étudiants) mène depuis 2009 une politique de développement des ressources numériques 24/24. Les objectifs sont multiples : renouveler l’offre de services du SCD, renforcer la politique d’exemplaires, constituer une bibliothèque numérique de niveau Master. Un financement de 10 000 euros (sur 3 ans) a permis d’impulser le projet ; l’offre se compose aujourd’hui de 1000 livres numériques. La direction a fait le choix de l’intégration en terme de modèle économique, de ressources humaines et de signalement : l’achat titre à titre permet d’insérer les livres numériques dans la politique documentaire (l’acquéreur qui choisit d’acheter le livre sous forme papier ou électronique), ceux-ci sont traités par les personnels référents dans les disciplines, et pas par des personnels dédiés ; tous les titres sont signalés dans le catalogue (pas de lien vers la plateforme éditeur ou agrégateur). Des priorités d’acquisition ont été définies : pas d’achat si le livre numérique est une édition antérieure à celle disponible au format papier, et soutien des disciplines faiblement représentées. 2 plateformes ont été retenues : Numilog et Dawsonera.
L’augmentation du budget de livres numériques (8% du budget documentaire global en 2010) se fera au détriment du budget papier. Ce qui va avoir pour conséquence, à terme, une baisse des prêts, et une baisse du travail pour les agents (moins d’équipement, moins de classement), d’où la nécessité de repenser les missions. Ceci dit, il semble qu’il y ait quand même une certaine marge avant d’en arriver là : en effet, les usages ne sont pas encore vraiment au rendez-vous, et les consultations restent faibles par rapport à l’investissement budgétaire (et c’est rien de le dire).
Plusieurs freins au développement du service sont constatés : le prix d’achat (il est scandaleux que le prix du livre numérique soit plus cher que celui du livre papier), le taux d’équipement des étudiants (tablettes en France = 4% ; mais à relativiser avec les smartphones, très présents, sur lesquels on lit aussi), la forme électronique (on se contente de reproduire le format papier, alors qu’on pourrait développer des contenus enrichis, qui seraient bien plus attractifs), les modèles hétérogènes (les droits de prêt diffèrent selon les plateformes), la nécessité d’opérer un choix sur le format (ce n’est pas à la bibliothèque ni à l’éditeur de choisir le format de lecture, le lecteur doit pouvoir lire les documents sur le contenant de son choix), la masse critique difficile à atteindre pour les livres en français (le livre numérique représente 10% de la production française, soit environ 80 000 ouvrages), l’embargo sur les éditions récentes, l’ergonomie d’usage (contraintes techniques de Numilog, par exemple).
Pour y remédier, le SCD a élaboré un plan d’action pour les personnels : prêt de tablettes, formation de tous les agents, diffusion d’une lettre d’information spécifique. Des actions sont également prévues en direction du public : des ateliers de formation, la mise en avant des collections numériques sur le site web des bibliothèques, l’ouverture des catalogues pour susciter le déclenchement de l’achat par les lecteurs (Patron-Driven Acquisitions, PDA), l’intégration dans les plateformes pédagogiques, la programmation d’un cycle de conférences sur les initiatives menées autour des interfaces de livres électroniques, l’acquisition d’un outil de découverte pour améliorer les possibilités de recherche, la mise en place d’un « salon de lecture numérique » orienté sur les thèmes d’actualité.
Retour d’expériences : Sciences Po Paris, Stéphanie Gasnot
Plusieurs problématiques : une offre faible et une demande forte, des contraintes d’achat en tant que Cadist (question de la conservation). Démarrage en 2008 avec une offre de 77 titres sur une plateforme anglophone. Diversification de l’offre en 2010-2011 (ajout de livres en français). 2012 : 3000 livres électroniques. La visibilité de l’offre a été améliorée par le signalement dans le sudoc (exemplarisation automatique) dans un premier temps, mais la volonté de cataloguer les ebooks dans le sudoc a été revue à la baisse (problème de la mise à jour des données), et les livres électroniques sont désormais catalogués uniquement en local.
Modèles économiques : la bibliothèque a fait le choix d’un mix entre bouquets et achat titre à titre : EBL (possibilité de faire des suggestions d’achat), Palgrave connect et Oxford schlarship online (no DRM), Taylor & Francis (développement du titre à titre mais DRM) ; Cairn et L’Harmathèque pour les livres francophones. Les livres électroniques bénéficient d’un budget dédié, en augmentation (53000 euros en 2012). La bibliothèque a fait le choix de rationaliser les acquisitions papier et électronique : les Que sais-je ? et les Repères ne sont plus achetés en version imprimée. En terme d’usages, c’est la plateforme Cairn qui arrive en tête, particulièrement pour les ouvrages de recherche (dont un grand nombre est édité aux Presses de Sciences Po, ce qui en fait du contenu particulièrement adapté au public visé).
Plusieurs questions restent ouvertes pour la bibliothèque :
– La problématique spécifique aux achats dans le cadre du CADIST n’est pas réglée : les livres électroniques, dans les conditions de vente actuelles, ne correspondent pas aux critères de diffusion et de pérennité exigés ; peut-être que les licences nationales et ISTEX seront un moyen d’y remédier.
– Le développement du modèle d’achat « pick & choose » permet plus de marge de manœuvre dans la gestion de la politique documentaire, mais multiplie les points d’accès, ce qui complexifie la navigation en l’absence d’un moteur de recherche fédérée.
– Les possibilités offertes par le PDA interrogent la politique documentaire : que reste-t-il du rôle du bibliothécaire et de la notion de collections ?
HLC : 3 remarques :
– La question de l’ergonomie paraît centrale. Il n’y a pas de raison que ce ne soit pas aussi simple avec l’électronique qu’avec le papier. Plateforme = web et pas livre. Il faut prendre en compte les besoins ergonomiques du lecteur.
– Les bibliothèques sont les principaux acheteurs du livre numérique, et elles en font l’acculturation auprès de leurs publics = ce n’est absolument pas pris en compte par les éditeurs, qui ne devraient pas pratiquer des tarifs aussi élevés pour les bibliothèques.
– Les plateformes font écran par rapport au livre, d’où l’intérêt du signalement au catalogue.
[Photos : CamilleStromboni, Knowtex]
Dans un billet tout récent sur Librarian.net, Jessamyn a diffusé ce message d’un de ses correspondants qui a testé le prêt d’ebooks pour le Kindle en bibliothèque :
« Ma première expérience d’emprunt d’un ebook pour Kindle à la bibliothèque m’a laissé comme un mauvais goût dans la bouche. Ca ne donnait pas l’impression d’emprunter un livre à la bibliothèque. J’ai plutôt eu l’impression qu’un commercial m’avait proposé un ebook avec une « offre d’essai gratuite et sans engagement » et me harcelait pour l’acheter à la fin de la période d’essai.
Je trouve la promotion commerciale d’Amazon excessive et inappropriée pour des usagers de bibliothèques publiques. Autoriseriez-vous le représentant d’un fournisseur à rester dans l’entrée, essayant d’attraper les lecteurs sur le chemin de la banque de prêt pour leur dire « Stop ! Pourquoi rendre cet ebook alors que vous pouvez l’acheter immédiatement pour seulement 12,95$ ? »
[…] Amazon a joué sur mon innocence :
D’abord, l’ebook était entièrement « marqué » ! Des soulignements ici et là et presque sur toutes les pages. C’était comme emprunter un livre à la bibliothèque et s’apercevoir que l’emprunteur précédent l’avait parcouru avec un surligneur ! Amazon permet de surligner et d’annoter les ebooks pour les bibliothèques. Mais au lieu de les effacer pour le prochain usager, on les laisse actifs, et on vous encourage à laisser vos propres commentaires à la vue de tous. […]
Ensuite, à la fin de la période de prêt, au lieu d’annoncer poliment que l’ebook doit être rendu – ou de proposer un renouvellement – voire d’envoyer une alerte pour amende à la bibliothèque :), j’ai été confronté à des publicités intrusives, à la fois sur mon Kindle et sur mon compte mail, m’enjoignant d’acheter rapidement l’ebook chez Amazon. Le message insistait sur le fait que « si vous achetez [cet ebook], ou si vous l’empruntez à nouveau depuis votre bibliothèque, toutes vos notes et annotations seront sauvegardées ». C’est donc pour ça qu’ils encouragent les lecteurs à gribouiller les ebooks de la bibliothèque : ils gardent nos notes et annotations en otage.
Puis, quand l’ebook est rendu, il ne s’évapore pas purement et simplement. Le titre, la couverture etc restent visibles sur mon Kindle, exactement comme si l’ebook était toujours disponible, sauf que derrière la couverture il n’y a rien d’autre qu’une notice qui signale que l’ebook a été rendu à la bibliothèque – et un juste bouton, qui ne nous propose pas de renouveler [le prêt]. La seule possibilité est d’acheter l’ebook chez Amazon.[…]
Enfin, il a été très difficile de nettoyer la publicité de mon application Kindle. Pas de bouton « Supprimer ». Il y a bien une option « Archiver », mais tout ce qu’elle fait, c’est déplacer le document dans une liste de « Documents archivés », où il reste comme les ebooks que j’ai vraiment achetés et que je pourrais vouloir re-télécharger. Et si on clique dessus, on a juste la possibilité « d’annuler » ou « d’acheter ». Qui voudrait garder ça ? Ni moi ni le commercial d’Amazon n’avons trouvé de bouton de suppression dans l’application Kindle. Le commercial prétend que le Kindle permet de le faire, mais n’a pas pu m’expliquer pourquoi ce n’était pas possible dans l’application Kindle. J’ai pu supprimer le fichier avec mon navigateur web, en me connectant à mon compte Amazon et en passant par la page « Gérer mon Kindle ».
Voilà. Maintenant je sais. J’ai gaspillé 20 minutes de ma vie pour le savoir.
J’ai reçu une seconde sollicitation par email de la part d’Amazon m’incitant fortement à acheter le livre. Combien vais-je encore en recevoir ?
Amazon se fait une belle pub en étant le seul fournisseur le livres pour le Kindle. Mais leur attitude agressive (« ne le rendez pas, ACHETEZ-LE ! ») dépasse les bornes. »
[photo : Michael Holden]
« Il m’est parfois difficile d’expliquer ma réaction vis à vis des gens qui disent que le papier est mort. Je ne veux pas être considérée comme luddite, ou comme anti-ebooks ; j’aime mon ordinateur, et j’aime le fait d’avoir tout l’internet dans ma poche.
L’existence des ebooks c’est, pour ceux qui ne peuvent pas stocker de livres imprimés, la possibilité de lire plus. Cela veut dire que les textes difficiles à trouver, ou ceux qui ne sont plus édités, sont de nouveau accessibles. Cela signifie, pour les gens atteints d’arthrite, d’affections des poignets, ou d’autres handicaps physiques qui rendent la lecture de livres imprimés difficile, la possibilité de lire à nouveau, sans que cela leur cause de douleur. J’aime que les ebooks existent.
Il n’empêche qu’à chaque discussion sur les ebooks, lorsqu’on en arrive inévitablement à « le papier est mort, l’édition traditionnelle est morte, tous les auteurs un tant soit peu intelligents devraient sauter le pas et franchir la frontière du numérique », ce que j’entends, bien malgré moi, c’est « Les pauvres ne méritent pas de lire ». Je ne pense pas que ce soit malveillant, et je ne pense pas que ce soit délibéré. Je pense juste qu’il est difficile pour nous, de ce côté de la fracture numérique, de nous souvenir qu’il y a des gens de l’autre côté de ce qui peut sembler être un gouffre infranchissable, qui se demandent s’ils vont être abandonnés. Actuellement, plus de 20% des américains n’ont pas accès à internet. Si cela vous paraît peu, dites-vous que ça fait une personne sur 5. Une personne sur 5 n’a pas accès à internet. Parmi ceux qui ont accès, nombreux sont ceux qui y accèdent depuis des ordinateurs partagés, ou depuis des lieux publics comme les bibliothèques, qui autorisent un usage public de leurs machines. Toutes ces personnes ne vivent pas sous le seuil de pauvreté ; certaines ont volontairement choisi de se simplifier la vie, et n’éprouvent pas le besoin d’y ajouter internet. Mais ce n’est vraiment pas la majorité.
Maintenant, d’après vous, combien de ces personnes ont-elles accès à une liseuse [d’ebooks] ? »
Across the digital divide, Seanan McGuire, auteur, 16/09/2011.
[photo : igomazic]
« Fermez les yeux et imaginez la situation suivante…
Nous sommes en 1988, et les bibliothèques sont concentrées sur les livres et les revues imprimés, les bibliothécaires sont toujours le passage obligé vers l’information, et la capacité à dire « Chut ! » au lecteur est une compétence reconnue.
Un utilisateur entre dans votre bibliothèque en quête de livres à emprunter pour ses recherches. Au lieu de voir une grande pièce remplie de livres rangés par sujet, il tombe sur une suite de petites salles. Chaque salle contient les livres d’un éditeur, et toutes les portes sont fermées. L’utilisateur salue le bibliothécaire, qui lui donne un gros trousseau de clés ainsi qu’une feuille avec des codes d’entrée. C’est nécessaire, parce que chaque salle doit être ouverte selon une méthode différente. Cela peut même se compliquer, car certaines salles limitent le nombre de visiteurs à 2 à la fois, ou bien éjectent les visiteurs après une demi-heure de consultation.
Fort heureusement, notre utilisateur sait de quels livres il a besoin, et vous le guidez vers la bonne salle. Après plusieurs tentatives, vous parvenez, soulagé, à lui ouvrir la porte. Il doit maintenant faire face à un nouveau défi : chaque salle possède des règles différentes pour la consultation et le prêt de livres. Dans certaines on peut consulter les livres sans limitation, et dans d’autres une voix mécanique rouspète au bout de 5 pages : « Arrêtez la consultation ! Si vous voulez en lire plus, empruntez-moi d’abord ! »
Notre utilisateur trouve les livres qu’il lui faut et lit les instructions sur la couverture. Pour un des livres en particulier, il faut également emprunter des lunettes spéciales, sans lesquelles la lecture n’est pas possible. Par chance, une paire de lunettes est disponible, et l’utilisateur vient vous voir pour emprunter les livres. Vous lui donnez les lunettes et estampillez chaque livre (merci de noter que chaque éditeur nécessite un tampon différent, et applique des règles différentes sur la durée de prêt d’un livre).
L’utilisateur commence à parcourir le livre et réalise qu’il faudrait qu’il en photocopie quelques pages, pour pouvoir prendre des notes. Malheureusement, il n’est techniquement pas possible de photocopier le premier livre, et on ne peut copier que 5 pages du second (mais pas dans le même chapitre).
Devant la photocopieuse, notre utilisateur rencontre un collègue. Celui-ci est intéressé par l’un de ses livres, et lui demande s’il peut le lui emprunter pendant quelques heures. Hélas, notre utilisateur est attaché au livre en question par une paire de menottes. Les 2 collègues doivent maintenant se présenter à l’accueil de la bibliothèque pour faire ouvrir les menottes avant de pouvoir se passer le livre.
Est-ce que cela vous semble irrationnel ? Inimaginable ? Pourtant, s’il on revient en 2011, c’est exactement la situation dans laquelle on se trouve en bibliothèque avec les livres électroniques … »
Merci à Dennie Heye (Dank u zeer !) de m’avoir permis de traduire son billet The one with the e-books chaos.
[Photos : EJP Photo, Pot Noodle]
A la base, le problème est que prêter des e-books, c’est absurde. Un e-book est juste un fichier électronique. Il n’a pas besoin d’être prêté ou emprunté – il peut juste être copié, à l’identique, sans aucun dommage pour l’original. Le sale petit secret des éditeurs, c’est que les e-books les terrifient.
Les e-books sont attractifs pour les bibliothèques parce qu’ils ne se déchirent pas, ne peuvent pas tomber dans la baignoire ou être dévorés par le chien. Ils ne nécessitent pas de venir à la bibliothèque physiquement pour être empruntés, n’ont pas besoin d’être enregistrés à la main, ni d’être rangés sur une étagère, et ils peuvent être consultés simultanément par plusieurs personnes. Malheureusement, les éditeurs ont concentré une grand part de leur créativité sur la recherche de moyens pour s’assurer que la plupart de ces avantages soient inutilisables, et que le prêt de e-books défie les lois de la physique et de la nature.
The trouble with eBooks: publishers defying the laws of physics sur It’s not about the books.
Sont cités, comme exemples de l’imagination des éditeurs dans le domaine :
– la limitation du nombre de prêts autorisés (politique d’HarperCollins restreignant la circulation des e-books à 26 prêts)
– la limitation de la consultation dans les locaux de la bibliothèque (position de l’association des éditeurs britanniques)
– l’application du cycle de diffusion des livres physiques aux e-books
Conséquences : piratage massif, faute d’une offre légale suffisamment attractive (ça ne vous rappelle rien ?). Mais aussi possibilité pour les auteurs de sortir d’un système qui tente de protéger ses acquis par des moyens juridico-techniques (délais de sortie différente selon les pays, DRM…) au lieu de chercher à se renouveler. L’auteur n’est pas tendre avec les éditeurs, qui, selon lui, ne font pas leur travail de sélection correctement puisque l’édition reste envahie d‘antibooks.
[photo : ToastyKen]
« Par comparaison avec les revues et les autres formes de littérature universitaire, les livres sont bien plus couramment achetés pour un usage personnel. Si les ouvrages universitaires étaient restés les seuls vecteurs de la recherche, les bibliothèques auraient conservé une plus grande influence, mais l’explosion des acquisitions de livres pour un usage personnel a eu un impact majeur sur les attentes des lecteurs.
Apple et Amazon ont joué un rôle capital dans la façon dont les e-books sont lus… mais, plus important encore, Amazon a aussi habitué les utilisateurs à naviguer dans- et à évaluer bien plus de métadonnées pour découvrir des titres et déterminer leur intérêt. L’expérience personnelle des utilisateurs concernant la découverte d’e-books dépasse désormais, et de loin, les ressources à la disposition des bibliothécaires pour fournir des métadonnées descriptives enrichies et de l’assistance à la recherche. Les bibliothécaires sont en train de réaliser qu’ils ne devancent pas les attentes des utilisateurs, mais qu’ils les suivent, et ce même dans leurs domaines de compétences de base. Le défi auquel les bibliothécaires doivent faire face est celui d’arriver à offrir une expérience au moins aussi riche [que celle d’Amazon] dans leurs propres environnements, mais augmentée de leur expertise dans le repérage d’outils, de contenus et d’éléments de contextualisation appropriés pour la découverte et l’évaluation d’e-books universitaires. Ces éléments de contexte devraient comprendre bien plus de métadonnées provenant des éditeurs : couvertures, extraits, critiques, évaluations, validation par les pairs, recommandations, réalisés notamment par les enseignants-chercheurs de l’institution et les experts locaux. »
How Individual Book Buying Experiences are Reshaping Academic Library User Expectations for Ebooks « InfoViews.
[photo : a440]
Mon Kindle et moi
Published 28/05/2011 e-book , Kindle adventures , Let's use the tools we promote 22 CommentsDepuis quelques semaines, je suis l’heureuse propriétaire d’un Kindle. Je me suis dit qu’il pourrait être intéressant de suivre mon parcours avec ce « nouveau » support sur ce blog.
Ergonomie, fonctionnalités
– L’encre électronique est bluffante, on dirait vraiment du papier. L’affichage est réglable : taille des polices, nombre de mots par phrase… On peut vraiment parler de « confort de lecture ».
– Le paiement n’est pas simple si on veut acheter ailleurs que dans le Kindle store : un achat qui prend moins d’une minute chez Amazon est tout simplement impossible ailleurs, en tout cas avec ma banque, qui m’impose de m’inscrire à un service plus sécurisé, moyennant l’envoi d’un code par SMS à *chaque* transaction… Heureusement qu’il y a Paypal.
– Très pratique, le chargement de documents personnels : le Kindle mange du .pdf, du .doc, du .txt, etc… pour peu qu’on ait pris la peine de convertir préalablement ses fichiers avec un outil comme Calibre, par exemple. A signaler, l’export pour Kindle disponible sur Instapaper : tous les articles « à lire plus tard » sont transférés en quelques secondes. Magique.
Contenus
– L’offre de livres en français est… comment dire ça poliment… maigre. Et nécessite, outre une certaine motivation, des qualités de fouineur bibliothécaire : il n’est pas possible de chercher par langue dans le Kindle Store, ni dans le site ereaderIQ que j’indiquais dans le dernier marché du mardi. En plus, il faut le savoir, les oeuvres en français du domaine public, qui sont gratuites dans le catalogue Amazon US, sont soumises à de la TVA si elles sont consommées en Union Européenne. J’ai fait le test : un recueil de titres de Victor Hugo, à 0$ quand je localise ma machine aux Etats-Unis, passe à 1,43$ si je suis en France.
En gratuit, on trouve des vieilleries classiques de la littérature, et encore, on se heurte parfois à des restrictions dûes au copyright. Du coup, même pour ces antiquités oeuvres du domaine public, il faut parfois chercher un peu pour récupérer le fichier qui va bien.
A un tarif abordable, il y a des daubes, mais il y a aussi des choses bien, chez publie.net par exemple ; mais on est déjà plus dans de la lecture « de découverte » (enfin si on ne lit normalement pas de « littérature contemporaine ») : l’amateur de polars, par exemple, ne retrouvera pas ses auteurs fétiches (malgré la prometteuse collection « Mauvais genres » qui démarre). Non, ceux-ci, quand ils existent en format numérique, sont vendus à peine moins cher que leur version papier brochée – dans ces cas-là, on n’achète pas, on commence plutôt à s’intéresser à l’offre non légale.
La qualité
Gratuit ou payant, cher ou pas cher, je n’ai pas encore lu d’ouvrage qui ne contienne pas au moins une faute de typographie, ou d’orthographe. Voire plusieurs sur certains textes. Ca paraît bizarre dans du tout-numérique, où on peut supposer que l’usage du correcteur orthographique est naturel. Quand je l’ai signalé sur le premier texte que j’ai acheté, l’éditeur (publie.net) a été très réactif et a mis à ma disposition une version corrigée dans les 3 heures qui ont suivi (ça c’est du service !). Après j’ai trouvé nettement moins d’erreurs, du coup j’ai laissé filer. Mais je réfléchis à une façon de faire remonter l’info à l’éditeur, parce qu’il me semble nécessaire que la qualité des livres numériques soit au moins aussi bonne que celle des livres au format papier.
Impact sur mes pratiques
Au bout d’un mois, mon appareil contient une trentaine de titres, provenant pour moitié de publie.net, la seconde moitié se partageant à part égale entre ouvrages du domaine public et articles de revues professionnelles formatés par mes soins. J’ai lu entièrement 10 documents, commencé 7. J’ai l’impression que le support favorise le « picorage », qui n’est pas dans mes habitudes de lectures ; on verra si c’est l’effet découverte ou si ça va perdurer. Je note 2 conséquences sur mes habitudes de lecture IRL traditionnelles : une baisse de la fréquentation de ma bibliothèque physique (une visite en un mois, au lieu des visites hebdomadaires – mais ce mois a été aussi riche en déplacements professionnels, alors ceci explique peut-être cela), et une hausse de mes achats de livres papier (3 en un mois), que j’attribue à la fréquentation plus assidue du site d’Amazon, mais je pense que ça ne va pas durer.