In the Internet era information will be free, the only question remaining is who pays for that freedom. — Kalev Leetaru

David Lewis, directeur des BU de l’Indiana University – Purdue University Indianapolis, propose dans le texte «
The 2,5% Commitment » de financer une infrastructure commune, nécessaire pour soutenir la science ouverte, en demandant aux bibliothèques d’y consacrer 2,5% de leurs budgets. Elle comprendrait, au minimum, les contributions des établissements :
« 1. Aux projets de logiciels libres qui sous-tendent les initiatives d’open science : Dspace, Fedora, Hyku, OJS, ArchiveSpace, Islandora…
2. Aux archives disciplinaires : ArXiv, bioRxiv, ou the Humanities Commons
3. Aux grosses bases de données hébergeant des contenus ouverts comme HathiTrust ou l’Internet Archive
4. Aux outils, de Wikipedia à VIVO, en passant par l’Open Access Button ou Unpaywall
5. Aux organisations de conservation telles que le Digital Preservation Network ou l’Academic Preservation Trust
6. Aux ressources éducatives libres telles qu’OpenStax
7. Aux organisations qui soutiennent ces développements, comme DuraSpace, le Center for Open Science, le Public Knowledge Project, l’Open Texbook Network, Impactstory, Orchid, ou Creative Commons
8. Aux organisations de promotion telles que SPARC »
Lewis souhaite aussi fournir une liste des différents outils et initiatives de soutien à la science ouverte, en regard de laquelle les établissements pourraient indiquer leur contribution financière, avec le choix de rendre publique cette information ou pas.
Au delà de la question financière, Lewis souligne qu’il y a une question de mentalité et d’organisation : en effet, malgré une longue tradition de travail en réseau, la mutualisation de capacités financières n’est pas encore entrée dans les pratiques des BU, et encore moins quand il s’agit de financer des structures, et plus seulement d’acheter de la documentation. Il y a un discours à porter auprès des tutelles, pour justifier l’allocation de ressources financières en soutien à des projets de science ouverte, qui n’est pas encore intégré dans les BU (en tout cas en France, du moins je n’en ai pas l’impression).
[Sur cette question d’organisation, on ne peut que faire le lien avec ce qui est en train de se mettre en place avec
SCOSS, Sustainability Coalition for Open Science Services, un projet à l’initiative de plusieurs associations de soutien à l’open access et d’associations de bibliothèques. Le principe est assez simple : chaque année, les structures proposant des services en faveur de la science ouverte peuvent candidater pour être éligibles à un financement mutualisé. 2 projets sont sélectionnés par session, que les institutions choisissent de financer selon un barême défini à l’avance ; un genre de crowdfunding institutionnel, en somme. Cette année, Sherpa/Romeo et le DOAJ ont été sélectionnés, soutenez-les !]
La proposition de Lewis
contrarie un peu Cameron Neylon, promoteur de longue date de l’open access : pour lui, un financement mutualisé ne peut fonctionner qu’avec un nombre réduit de participants, et nécessite un fort niveau de coordination, difficile à mettre en place au niveau d’un état (en tout cas aux Etats-Unis). Il questionne aussi la définition du pourcentage : qu’est-ce qui est couvert par cette fraction du budget ? Et comment le rationnaliser pour l’expliquer au sein de « la communauté », dans le cadre d’institutions pluri-disciplinaires, qui agrègent une myriade de communautés avec leurs spécificités et où le sens de « la » communauté n’est pas la chose la plus répandue ? Il est néanmoins d’accord avec la majorité des arguments de la proposition de Lewis, et conclut :
« Je pense que l’objectif est sur-évalué. Il demande à ce que trop d’universités participent, il implique des risques politiques à la fois internes et externes qui sont exactement ceux qui ont ralenti l’implémentation de l’open access. Il suppose un pouvoir sur les budgets, et le consentement implicite des universitaires, qui n’existent vraisemblablement pas et sont pratiquement impossibles à obtenir, et les masque derrière un petit pourcentage. Obtenir ce petit pourcentage demande quand même une grande coordination entre de nombreuses institutions, et il me semble peu probable d’y arriver.
Et en même temps cet objectif est loin d’être assez ambitieux. Si l’on veut vraiment transformer la communication scientifique en passant d’une logique de contrats de service à une logique de plateformes partagées, alors se contenter de cibler 2,5% est voué à l’échec. Personne ne sait quel devrait être le chiffre idéal, mais il me semble clair que si nous voulons faire des économies, il faut partir sur un pourcentage élevé. Nous avons besoin d’une optimisation systémique, qui nous permette de récolter les bénéfices de l’offre commerciale, y compris le capital extérieur, la qualité du service et la concurrence, tout en conservant progressivement une plus grande part des normes, des plates-formes et des mécanismes d’échange dans la sphère communautaire.
Passer d’une logique d’acquisition à une logique d’investissement est une façon d’ y parvenir. »