« Si nous envisageons cela [la loi de Pareto, connue aussi sous le nom de loi des 80/20] dans le contexte des modèles de prêt des e-books, nous voyons qu’HarperCollins a bien réussi son coup. En concentrant notre attention sur les livres qui sont beaucoup empruntés, […], HarperCollins nous a amené à négliger les 80% de livres qui ne circulent pas ou peu. Pourtant les bibliothèques payent le plein tarif pour ces livres-là aussi, et il est clair que les éditeurs se font infiniment plus d’argent sur les livres qui ne circulent pas dans les bibliothèques que sur ceux qui ne se vendent pas en librairie !
Tout bien considéré, un des impacts économiques des bibliothèques, en plus de ceux dont j’ai déjà discuté, est de transférer du pouvoir d’achat des best-sellers vers des livres moins populaires. On peut même faire valoir que les bibliothèques soutiennent une culture large, qui disparaîtrait sans ce soutien. Et devinez qui publie ces best-sellers ? Les 6 plus gros éditeurs, bien sûr. Il payent de grosses avances aux auteurs, d’énormes frais de publicité auprès des librairies, font passer leurs auteurs dans les talk shows et obtiennent des critiques de leurs bouquins dans le Times. Cela demande beaucoup d’argent, mais la dépense est largement compensée dans une économie basée sur quelques titres vitaux ou sur des « cartons » de librairie.
Alors voilà l’astuce : en focalisant le débat sur des mécanismes de revenus générés par la popularité, HarperCollins mise sur les gros succès de librairie et affaiblit la longue traîne. Cela peut affecter négativement les bibliothèques, mais celles-ci sont des dommages collatéraux. C’est bien la longue traîne qu’HarperCollins essaye de détruire. »
Extrait de The Pareto principle and the true cunning of HarperCollins, par Eric Hellman, qui propose des analyses toujours fort pertinentes des problématiques économiques autour du livre et des bibliothèques.
[photo : linkwize]
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